« Vous êtes riches, je vous remercie infiniment de m’avoir montré votre richesse. Merci les Souverains » Jean Barbe.
"L’histoire du petit Aylan a remis le couteau dans la plaie
Je me souviens d’avoir marché tout au long du Tanganyika pour avoir la paix
Pour enterrer les miens, offrez-moi au moins une pelle
C’est un père, c’est une mère, une soeur, un frère qui manquent à l’appel »
Kastar.
L'intégrale
Extrait
Avec José Manuel
Armé de prose et de lignes,
je viens de poser le so sur les lead,
apporter l'eau et le bead,
pour apaiser les pauvres et les riches..Pour la cause,
je me suis fait clouer les paumes et les pieds,
On m'a cloué les côtes par des couronnes d'épines,
Pardonnez-leur car ils ne savent pas ce qu'ils font,
on rit des malheurs des autres,
mais quand c'est nous, on s'effondre,
Je ne porte pas de prada ni le manteau d'un pauvre,
Je n'ai pas de Palace,
je l'ai mis dans l'arche des pauvres,
Je garde mon axe et compose des proses,
si au contact expose et explose,
je mets des contrats d'expose,
ma vision des choses...
Jean Barbe
Bienvenue parmi les
Souverains anonymes
01- Bonjour Jean Barbe, Je m'appelle Gaetan. Bienvenue au Souverains. Tu as longtemps le rédacteur en chef du journal Voir. Tu es chroniqueur, auteur, animateur et éditeur de livres. Avant de te parler des livres que nous sommes, dis-moi d'abord, si ta vie devait être un livre, elle porterait quel titre ?
Moi si ma vie devait être un livre, elle porterait le titre "Je n'ai pas choisi ma vie, mais j'ai choisi de la vivre". Le premier chapitre s'intitule "Mon frère à moi" et le voici:
"Maman, maman, je veux un frère". C'est la phrase que je répétais toujours à ma douce et merveilleuse mère quand j'avais l'âge de 10 ans. En même moment en Haïti, mon cousin Emmanuel et ma cousine Christine venaient tout juste de perdre leur parent. Un jour ma mère m'annonça que mon voeux allait se réaliser. Dans quelques jours Manou et Christine arriveraient d'Haïti. Nous étions en mois de décembre et la neige masquait le sol. Mon père et ma mère étaient allés les accueillir à l'éoroport Mirabel. J'étais très impatient. J'attendais mon nouveau frère comme un enfant attend ses cadeaux pour Noël.. Et puis tout à coup un taxi s'arrêta devant chez-moi. Mon paternel fût le premier à en descendre et puis Emmanuel est apparu. Je m'en rappellerai toute ma vie. Manou était vêtu d'un costume blanc comme du lait. Sans manteau, il grimaçait à cause des milliers de flocons qui l'attaquaient.
La première fois que j'ai rencontré Manou, j'avais six ans, lors de mon premier et seul voyage dans la Perle des Antilles. Il était plus âgé que moi, il m'avait amené à la mer, il était vif d'esprit. Fort et courageux. Un vrai modèle pour moi. En entrant à la maison chaude et accueillante, je lui ai donné l'accolade. Il était souriant, signe que la vie lui donnait une seconde chance. Il y avait trois chambres dans notre appartement. Une pour mes parents. Ma soeur avait la sienne et moi et Manou nous occupions la troisième chambre. Cette première nuit pour lui a été bien longue car je lui ai posé mille et une questions.
À l'école, j'étais fier de dire que j'avais un frère. Il a été une grande source d'inspiration. Manou, bien sûr c'est mon cousin, mais Manou, c'est mon frère à moi.
02- Bonjour Jean, en 2012, au coeur du printemps érable, tu as déjà dis quelque chose qui ressemble à ça:
Se faire fourré de loin
Se faire fourrer de près
Il est beau le progrès
au palais des congrès
De la reine à Charrest
On accumule les regrets
Armé d'une pomme, d'un projet,
Je réagis au rejet
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Titre d'un livre engagé.
Dis-moi Jean. En 2012, le Québec a connu son printemps érable. Qu'en reste t-il ?
03- Bonjour Jean, je m’appelle Fernando, Si ma vie était un livre il porterait le tire «Mon fils, ma liberté ». Ça pourrait commencer ainsi!
J’ai 12 ans, je me trouve entre deux pays. L’argentine, derrière moi. Le Canada, devant moi. Derrière moi aussi, un père retenu là-bas. Avec moi une mère qui m’a tout donné. Je m’installe avec elle au Centre-sud de Montréal. Un quartier dit difficile, un quartier défavorisé. C’est dans ce quartier que j’ai fais mes armes. C’est entre l’école et la maison que j’ai appris à devenir grand. C’est dans ce même quartier que je pouvais m’asseoir au coin d’un trottoir et rêver du jour où j’allais revoir mon père. Un jour, j’ai 16 ans et j’apprends que mon père n’est plus. Mon père est mort et avec lui le rêve d’un retour au pays natal..
Aujourd’hui, j’ai 27 ans, je suis père d’un petit garçon de 6 mois et demi. Je suis à mon tour père. Je ne suis sûr que d’une chose dans la vie. Je ne serais pas un père absent. Je vais revoir l’Argentine avec ma femme et mon fils. Merci!
04- Bonjour Jean, je m’appelle Francis. Si ma vie devait être un livre, il porterait le titre « Mon dernier jour à Bordeaux ». J’ai passé cinq ans en dedans. Dans quelques jours, je donnerai le dos à la prison « Bonjour la liberté, Bonjour Jessica ». Dans quelques jours, je vais rencontrer pour la première fois une femme qui m’a beaucoup soutenu moralement dans les derniers mois de ma sentence. Si tu permets Jean, je vais lui adresser quelques mots:
"Ma chère Jessica,
Au premier jour, j’appréhendais déjà mon dernier en prison. Je ne pouvais vivre une journée à la fois, sans m'accrocher à ce dernier jour qui allait me ramener à la lumière. Mon dernier jour en dedans, c'est ma petite lumière au bout du tunnel. Très bientôt, je vais quitter le tunnel, j'aurais enfin payé ma dette à la société. Mais je sais déjà qu'une partie de moi va rester à jamais ici. J'ai croisé des frères ici, des amis et des ennemis. Avec eux, j'ai partagé le meilleur et le pire. Je sais déjà qu'ils vont me manquer. Alors, j'ai peur. Ma joie de partir se mêle à ma peur de revenir. Ma peur de ne pas tenir le coup. Ma peur des tentations. Ma peur de ne pas organiser ma vie en dehors d’un système organisé. Un système bonbon qui n'est pas si bon. Ça fait cinq ans que je n’ai pas fais mon repas seul. Ça fait cinq ans que je suis à la merci d’un menu sans surprise et sans saveur. Ça fait cinq ans que je rêve de faire ma propre cuisine. Dans leur cuisine, je sens une odeur d'institutionnalisation. J'ai hâte de faire mes repas. Tu m'as dis que tu es bonne cuisinière Jessica, je serai ton meilleur élève.
Jessica, j’aimerais te remercier pour ton écoute, pour ton amitié, pour ces mots que j’avais besoin d’entendre. Avec tes paroles sincères. tu m'as redonné confiance. Je vais te suivre Jessica, loin de Montréal, loin de la peur, loin du tunnel.. J'ai envie de te parler de moi et surtout de mes projets. J'ai envie que tu me parles de toi. On se racontera nos vies et nos projets devant un repas chaud, avec des fleurs et des bougies pour célébrer notre amitié, pour célébrer la vie.. Jessica, tu es ma lumière au bout du tunnel..
Je vais arrêter là. Le meilleur de moi est à venir. Je t'embrasse tendrement.
Francis."
05- Bonjour Jean, je m'appelle Patrice. Si ma vie devait être un livre, il s'appellerait "Allo Papa". Le livre commencerait à peu près avec ces mots:
Il est 18h, les portes des cellules viennent d'ouvrir. Je cours vers le téléphone pour appeler Caro comme je le fais une fois par semaine. Ça sonne, j'ai mal à la tête. Je me demande si c'est pertinent de parler avec ma tchum de fille avec un mal de tête. Je décide de raccrocher et appeler le lendemain. Juste avant de remettre le combiné à sa place, j'entends la voix de Caro. D'habitude elle dit "Allo", je réponds par un autre "Allo", je la niaise, elle me niaise. Elle me dit souvent "Tu connais pas la dernière?" et je réponds "Mais non Caro, je connais juste la première". N'importe quoi pour meubler ce temps d'amitié sincère qui nous lie depuis très longtemps. Cette fois Caro, a dans la voix quelque chose que je n'arrive pas à cerner. En me disant "Tu sais quoi Patrice..?" suivi aussitôt d'un "Devine" et sans attendre ma réponse elle enchaîne "Devine qui est avec moi maintenant et il veut te parler". Je réussis à peine à répondre "Que veux-tu que je devines?", elle conclut avec "Je vais t'aider. Qui est avec moi et que tu n'as pas vu depuis 17 ans?".
Dans mon long silence, je sens que mon mal est passé de la tête au ventre, quelque part pas loin du coeur. Je n'ai pas ressenti ce mal depuis 18 ans. Exactement, depuis l'instant ou j'ai appris la plus belle nouvelle de ma vie. Quand mon ex femme m'avait appris qu'elle attendait un enfant de moi. Je ne devine pas, je sais que la voix que je vais entendre est celle de mon fils. "Allo Papa" sera toujours la plus belle phrase qu'un père peut entendre.
Jean Barbe, pour te dire franchement, moi je ne suis pas un homme de mots. J'ai demandé de l'aide pour faire ce texte. Toi, tu es un professionnel des mots et moi j'ai toute une vie à raconter. Une vie dont la moitié passée en prison. Ma vie a commencé avec un viol. Une longue histoire à raconter.. Alors je te laisse juger si c'est pertinent de faire de tes mots et de ma vie un livre ?
06- Bonjour Monsieur, je m’appelle Pierre la Vedette. Ma vie est déjà un livre qu’on peut retrouver partout, même chez Jean Coutu. Mon livre s’appelle "MOI". il est question de Moi, myselfe and I. Mon livre est le portrait d'un momaniaque. Un égoïste assumé. Mon égo est tellement grand qu’il ne passe plus dans les portes. L’univers n’existe que pour me servir. La terre, le soleil et les arbres, pour me servir. Les voitures, les femmes, l’argent, pour me servir. Le salaire minimum, les enfants chinois, les mines du Congo.. Pour me servir. Vous êtes journaliste, chroniqueur, animateur, écrivain, et éditeur.. Pour me servir MOI, roi de la finance, roi des paradis fiscaux, roi des rois.. Personne n’est plus beau que moi, n’est plus fort que moi, n’est plus riche que moi.. Avec mes pouvoirs, j’achète tout et tout le monde, des plus riches au plus pauvres.. Mais, j’ai un faible pour les bouffons et les bouffonnes.. Ceux qui parlent pour ne rien dire. En marketing, en lobbying, en relation publique, en conseiller politique pour dominer, pour manipuler les opinions publiques... Les bouffons et les bouffons, pour me servir.. Il y en a tellement sur terre. Leurs missions, propager des guerres.. Pour me servir.. Pas pour partager, pas pour rendre les riches moins riches et les pauvres moins pauvres.. Leur mission, c’est de tuer la beauté du monde.. Pour me servir.. Apparemment, ils n’ont pas fini..
Je n’ai pas de questions pour vous Monsieur le journaliste. J’avais une réponse à vous donner.. Partagez-là..
07- Bonjour Jean, tu es un homme de mots et de parole. Comme tu sais, il y a la parole qui divise et la parole qui unit. Celle qui divise a pris trop de place sur la place publique. Celle qui unit se fait de plus en plus rare. Comment réhabiliter la parole qui unit ? Où sont passés les Martin Luter, les Mandela et les Grandi..? Jean Barbe, donne-moi l’exemple d’une parole célèbre qui a déjà unit un peuple..?
08- Bonjour Jean, je m’appelle Christian. Comme toi, j’ai appris à cogner avec les mots: Texte.
09- Bonjour Monsieur, je m’appelle Andrès. Ma vie à moi, ce n’est pas un livre, c’est une chanson espagnole et la voici:
10- Jean Barbe. Il y a une autre façon très simple de se mettre en prison, c'est de ne pas se remettre en question. Ici, pour beaucoup parmi nous, nous travaillons à nous remettre en question. Que suis-je, que veux-je? où vais-je ? Rien de ce que j'ai appris hier n'est sûr aujourd'hui. On m'a appris à être gentil. Je ne veux plus être gentil. On m'a fait porter des masques, je ne veux plus porter de masques. Tout autour de moi, me conduisait sur le chemin qui mène à la prison, je change de chemin. Le seul chemin qui me paraît digne de mes pas est celui qui mène vers mon coeur, mon amour pour les miens, pour l'humanité, pour la nature et pour les plus faibles d'entre nous.
Tu as été aujourd'hui un des nôtres, tu nous a fais l'honneur d'être notre premier invité de l'année. Je te souhaite santé, paix et beaucoup de livres. Au nom de tous mes camarades, je te déclare Jean Barbe, Souverain anonyme.