21 oct. 1999 | Vidéos, Audios, Rencontres, 1996 à 2000

Nancy Dumais II

"Couché dans mon univers carcérale, Je rêve de couper le cordon ombilical" Luc Markov

Nancy Dumais II 1

Deuxième visite

21 Octobre 1999

Nancy Dumais II 2

Deuxième visite

21 Octobre 1999

Nancy chante avec deux Souverains.


Jeudi 21 octobre 1999


Je quitte ma cellule

Je traverse les couloirs

Je salue mes amis

Je leur dis « à plus tard »

Je n’ quitte pas Bordeaux

du moins pas encore

je m’évade dans les mots

et la musique des noirs

Ma vie est un roman

Ma vie est une chanson

Qui en est l’auteur

c’est toute la question

Des questions que je me pose

en vers et en proses

Je te salue Nancy

Et je te plaide notre cause

Nancy Dumais

Bienvenue parmi les

Souverains anonymes

  • La première fois que les Souverains avaient reçu une femme enceinte, c’était en 1990. C’était Charlotte Laurier qui portait son premier enfant dans le ventre. Toi aussi Nancy tu n’es pas seule aujourd’hui à nous rendre visite. En plus de tes deux musiciens, tu arrives avec quelqu’un d’autre. Un ange est dans ton ventre et à cet ange, nous disons bienvenue parmi les Souverains anonymes........

Nancy, il paraît que tu n’as pas hésité à accepter la réinvitation de Mohamed. Personne des Souverains d’aujourd’hui n’étaient présents à ton dernier passage à notre émission. J’imagine que tu avais aimé ta première visite. Mais qu’est-ce ça représente pour toi personnellement le fait de franchir une porte de prison pour rencontrer et parler à des hommes qui n’ont rien de particulier si non d’être un peu plus anonymes que d’autres hommes..?

  • Nancy, d’après ton premier album, tu aimes ça parler aux anges. Depuis que tu es enceinte, tu dois parler encore plus souvent aux anges. Tu en portes un en toi. Alors, qu’est-ce que tu lui racontes.. ? Ou plutôt, qu’est-ce que lui, te racontes..?

Je sais que tu travailles actuellement sur ton deuxième album. J’imagine qu’on va retrouver dans cet album un peu de ce que tu vis. Est-ce que la gestation qui précède la naissance d’un enfant inspire celle qui précède la naissance d’un album..?

Nancy, tu seras bientôt une Maman. J’ai déjà vécu le sentiment d’être bientôt un Papa. Je connais ce sentiment indescriptible d’attendre un enfant. Le premier enfant. Mais, bien sûr, ce n’est pas moi qui étais enceinte. Personnellement, je suis très proche de mes enfants et je m’en occupe très bien. Mais tous les pères ne sont pas comme ça. Parfois, je me demande s’il ne faut pas faire partager aux pères la responsabilité de porter un enfant avant sa naissance. Mais, apparemment Dame nature ne voit pas les choses ainsi.. Toi Nancy, comment vois-tu les choses quand il s’agit de partager la responsabilité d’avoir un enfant..?

  • Si tu savais Nancy combien les pères à Bordeaux sont attachés à leurs enfants. Ce sentiment est encore plus grand depuis que l’administration de Bordeaux, avait coupé le droit des détenus aux visites contact avec leur famille. On n’a pas besoin d’avoir des enfants pour comprendre la gravité de telle décision, et pourtant, les responsables de cette décision ont aussi des enfants. Aucun argument ne peut justifier une telle décision. Ni les coupures budgétaires. Ni les raisons de sécurité. Ni la déménition d’entrée de drogue.

(Il n’y a pas moins de drogue à Bordeaux depuis que cette décision est en vigueurs, depuis deux ans). Bordeaux est la seule prison qui a coupé les visites contact.. Parmi nous, certains se sentent doublement en dedans à cause de cette décision. Mais, je vais arrêter là. Je pense que mon message est assez clair pour les quelques auditeurs qui nous écoutent maintenant.

  • Nancy, il paraît que tu as particulièrement adoré « Libre à vous », l’album des Souverains anonymes. Moi, je ne l’ai jamais écouté. Bientôt, nous allons exposer notre album au Salon du Livre de Montréal.. Si c’est toi qui devais le vendre, que dirais-tu aux visiteurs du Salon du Livre pour les convaincre de

l’acheter..?

  • Dans les premières années de Souverains anonymes, nos invitées femmes devaient répondre à des petites questions par des petites réponses. C’était le quiz des Souverains anonymes. Parmi ces questions, une te concerne Nancy. La voici :

La tendresse est une caresse sur le ventre d’une femme enceinte. Puisque tu es cette femme Nancy, quelle caresse tu préfères.. Avec la main, ou avec l’oreille..?

  • À Bordeaux, ce qui peut arriver de mieux à quelqu’un c’est d’attraper la picure de l’écriture.. Non seulement le temps passe plus vite, non seulement ça procure un sentiment d’évasion, mais ça me donne parfois le sentiment que je serre vraiment à quelque chose, que finalement, je ne perds pas mon temps.

Voici ce que j’ai écris en m’inspirant des titres de ton album :

Nancy Dumais, t’es revenue enfin, dans le cirque fou de Bordeaux. Tu aurais pu laisser faire, mais au lieu de ça, t’es venue parler aux anges que nous sommes, certains cornus, d’autres déchus, mais ange quand-même. Nancy, tu as quelque chose à nous dire. Ton visage est illuminé par la petite chanson qui respire et souffle la vie en toi. Reste avec nous Nancy et partage avec nous cette lumière de vie. Il n y a que toi aujourd’hui qui puisse nous porter sur une rivière de liberté, vers tes eaux blues . Nous sommes soudés à jamais à toi, à ta voix, à tes paroles, à ta musique.

Nancy, avec tes musiciens Sébastien Daigle et Martin Bachamp, je vous invite à nous faire du bien. À toi de jouer et à nous de vous applaudir................

Salut Nancy, À ta dernière visite un Souverain n’osait pas te demander si tu avais un homme dans ta vie. Il s’est arrangé pour que toi, tu lui demande s’il y a une femme dans sa vie.. Aujourd’hui, la question ne se pose plus. La seule chose à dire : Heureux et chanceux celui qui partage ta vie..

Nancy Dumais, c’est la deuxième fois chez les Souverains, ce n’est peut-être pas la dernière fois.. Au nom de tous mes camarades, je te déclare toi et tes musiciens, Martin Bachamp et Sébastien Daigle, Souverains anonymes.

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En cavale,

Couché dans mon univers carcérale,

Je rêve de couper le cordon ombilical,

Pour me relever de ma position foetale,

Et pouvoir me libérer par un cri primale

Je dors dans ce monde, devenu normal

Dans ce monde, tout semble banal,

Parmi les marginaux, je suis marginal

Des histoires vraies, d’autres mentales.

Une douce follie, me mord, comme un chacal

Qui veut faire saigner, mon piedestal,

Pour que je tombe dans ce lit hivernal

Couché dans mon univers carcéral

Je rêve de faire sortir de moi cet animal

Source de haine et de douleur viscérale

Tellement puissante et si infernal,

Que je meurs parfois.. Oui, j’ai mal

Je me vois, dans ces eaux prénatales,

Flottant dans mon univers téâtrale

Rêvant de hurler ce cri de liberté triomphale

Rêvant de hurler enfin ce cri, suffoqué.. Brutal.

Luck Markov

20 oct 1999

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